Par un arrêt du 23 octobre 2024 (Cass.Civ 1ère, 23 octobre 2024, n° 22-17.103), la Première Chambre Civile de la Cour de cassation est venue confirmer les termes de son avis du 20 avril 2022 (Pourvoi n°22-70.001) en considérant que lorsqu’un divorce a été prononcé conformément aux prétentions de première instance d’un époux, ce dernier est irrecevable à interjeter appel de ce chef.
En l’espèce, un jugement a prononcé le divorce aux torts exclusifs de l’époux.
L’époux a interjeté appel de cette décision limité aux effets du divorce de sorte que le principe du divorce avait vocation à devenir définitif à court terme, privant ainsi l’épouse de la pension alimentaire qu’elle percevait au titre du devoir de secours durant la procédure d’appel.
L’épouse a donc formé un appel incident sur le principe même du divorce.
Son époux a soulevé l’irrecevabilité de cet appel pour défaut d’intérêt à agir, considérant que son épouse avait obtenu ce qu’elle demandait en première instance sur le prononcé du divorce.
Le Conseiller de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir formée par l’époux estimant que son épouse bénéficiait d’un intérêt à agir certain puisqu’elle avait intérêt à ce que le devoir de secours soit maintenu le temps de la procédure d’appel.
L’époux a formé un pourvoi.
Cassation : la réponse est désormais clairement affirmée par la Cour de cassation et elle est négative !
Il faut comprendre que tout l’enjeu réside dans le maintien, ou non, des mesures provisoires (notamment au titre du devoir de secours) durant la procédure d’appel.
La Haute Juridiction rappelle que l’intérêt à interjeter appel a pour mesure la succombance qui réside dans le fait de ne pas avoir obtenu satisfaction sur un ou plusieurs chefs de demande présentés en première instance.
Par conséquent, si l’épouse justifiait bien d’un intérêt personnel à maintenir le versement du devoir de secours pendant la procédure d’appel, cela ne lui conférait aucunement un intérêt à agir en appel dès lors qu’elle avait obtenu en première instance le divorce aux torts exclusifs qu’elle demandait.
La position de la Cour de cassation est donc susceptible de mettre en grave difficulté financière l’épouse (ou l’époux) qui ne bénéficiera plus d’un devoir de secours si un appel est formé à l’encontre du jugement de divorce.
Jusqu’à présent, la Cour de cassation considérait que la preuve obtenue à l’insu de son adversaire (enregistrement clandestin par exemple) était déloyale et donc irrecevable.
Par un arrêt du 22 décembre 2023 (Cass.Ass.Plén, 22 décembre 2023, n° 20-20.648) la Cour de cassation en Assemblée Plénière juge que la déloyauté n’est plus nécessairement un motif d’irrecevabilité.
En l’espèce, elle retient donc comme mode de preuve un enregistrement audio du salarié obtenu à son insu.
Le Juge devra donc apprécier au cas par cas si le mode de preuve ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux de l’adversaire.
Ce faisant, la Cour de cassation suit la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
En effet, celle-ci ne retient pas par principe l’irrecevabilité des preuves déloyales.
Elle demande au Juge de « mettre en balance » les droits et intérêts en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.
Désormais, le parent poursuivi par le Ministère Public ou mis en examen par le Juge d’Instruction pour un crime commis sur l’autre parent mais aussi pour une agression sexuelle incestueuse ou pour un crime commis sur son enfant, perd automatiquement son autorité parentale et son droit de visite et d’hébergement le temps de la procédure pénale (article 378-2 du Code Civil).
Cette suspension prendra le cas échéant fin, soit par une décision du Juge aux Affaires Familiales que le parent pourra saisir, soit à l’issue de la procédure pénale.
Parallèlement, pour les infractions les plus graves, c’est-à-dire les crimes ou les agressions sexuelles incestueuses commis sur son enfant par le parent, ce dernier se verra automatiquement retirer l’autorité parentale par le Juge pénal, sauf décision contraire spécialement motivée.
Dès lors que les parents manquent à leur devoir en se montrant violents, le Juge y compris pénal intervient pour protéger les enfants !
Cette loi constitue une avancée indéniable mais la route est encore longue afin de protéger pleinement l’enfant..
En l’espèce, la Cour de cassation retire l’exercice de l’autorité parentale au parent responsable de l’escalade du conflit arrêt du 16 novembre 2022 (Civ 1ère, 16 novembre 2022, n°21-15.002)
En l’espèce, alors même que les parents exerçaient en commun l’autorité parentale à l’égard de l’enfant, la mère a multiplié les procédures judiciaires et les démarches non concertées à propos de la scolarisation de l’enfant, retardé unilatéralement le retour de l’enfant auprès de son père, qu’elle n’avait eu de cesse de dénigrer, et alerté les forces de l’ordre et le Procureur de la République.
Elle avait elle-même désigné l’enfant comme « l’enfant de la guerre » !
L’escalade du conflit parental, alimenté par la mère, a créé chez l’enfant un état d’insécurité permanente, le plaçant dans un conflit de loyauté tel que selon la Cour de cassation son intérêt justifiait de confier l’exercice unilatéral de l’autorité parentale au père.
Elle estime ainsi que le comportement de la mère démontre non seulement son inaptitude à respecter les droits de l’autre parent mais surtout à répondre aux besoins de l’enfant.
Cette décision ne peut qu’être saluée car l’enfant doit être protégé du conflit.
Les Juges ont trop tendance à renvoyer les parents dos à dos…
Certes, ils sont parfois tous deux responsables du conflit parental mais pas toujours et il faut trouver les moyens de désarmer le parent qui, alimente le conflit…pour l’enfant.
Beau rappel à l’ordre de la Cour de cassation !
La prestation compensatoire s’apprécie indépendamment des droits que les époux tirent du régime matrimonial.
Le 21 septembre 2022 (Civ 1ère, 21 septembre 2022, n°21-12.344), la Première Chambre Civile de la Cour de cassation est venue confirmer une jurisprudence constante (Civ 1ère, 21 septembre 2016, n° 15-14.986) selon laquelle l’appréciation de la disparité pour fixer une prestation compensatoire est déterminée indépendamment de la part de communauté devant revenir à l’époux créancier de la prestation compensatoire.
En l’espèce, un époux a été condamné à verser à son épouse une prestation compensatoire évaluée en excluant les droits des époux dans liquidation de leur régime matrimonial.
Contestant l’évaluation réalisée par les juges du fond, l’époux a formé un pourvoi reprochant à la Cour d’Appel de ne pas avoir recherché si la liquidation du patrimoine commun n’était pas de nature à réduire sensiblement les besoins de l’épouse créancière de la prestation compensatoire.
En d’autres termes, la liquidation à venir du régime matrimonial devait-elle être prise en compte dans la fixation de la prestation compensatoire ?
La Haute Juridiction n’accueille pas le moyen : « la liquidation du régime matrimonial des époux étant par définition égalitaire, il n’y avait pas lieu de tenir compte de la part de communauté devant revenir à Mme [U] pour apprécier la disparité créée par la rupture du lien conjugal dans les situations respectives des époux ».
La critique est permise lorsque l’on sait que très souvent les époux ont des droits inégalitaires dans la communauté car ils sont titulaires d’une dette ou créance de communauté et que l’article 271 du Code civil impose de prendre en compte les patrimoines des époux après la liquidation du régime matrimonial.
A nuancer : les droits dans la liquidation ne sont pas pris en compte pour apprécier la disparité mais dès lors qu’elle est établie, le résultat prévisible de la liquidation du régime matrimonial sera pris en compte afin de chiffrer la prestation compensatoire.
Espérons que la Cour de cassation reverra prochainement sa copie !